If  –  by Rudyard Kipling

(version française plus bas…)

If you can keep your head when all about you

Are losing theirs and blaming it on you,

If you can trust yourself when all men doubt you,

But make allowance for their doubting too;

If you can wait and not be tired by waiting,

Or being lied about, don’t deal in lies,

Or being hated, don’t give way to hating,

And yet don’t look too good, nor talk too wise:

If you can dream and not make dreams your master;

If you can think and not make thoughts your aim;

If you can meet with Triumph and Disaster

And treat those two impostors just the same;

If you can bear to hear the truth you’ve spoken

Twisted by knaves to make a trap for fools,

Or watch the things you gave your life to, broken,

And stoop and build’em up with worn-out tools:

If you can make one heap of all your winnings

And risk it on one turn of pitch-and-toss,

And lose, and start again at your beginnings

And never breathe a word about your loss;

If you can force your heart and nerve and sinew

To serve your turn long after they are gone,

And so hold on when there is nothing in you

Except the Will which says to them: ‘Hold on!’

If you can talk with crowds and keep your virtue,

Or walk with Kings – nor lose the common touch,

If neither foes nor loving friends can hurt you,

If all men count with you, but none too much;

If you can fill the unforgiving minute

With sixty seconds’ worth of distance run,

Yours is the Earth and everything that’s in it,

And – which is more – you’ll be a Man, my son!

Le poème de Rudyard Kipling « If » (Si)  a été composé en 1885.

Il fut traduit de façon superbe et littéraire (et non pas littérale) par André Maurois en 1918 (ci-après). 

Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie

Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,

Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties

Sans un geste et sans un soupir ;

Si tu peux être amant sans être fou d’amour,

Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre,

Et te sentant haï, sans haïr à ton tour,

Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d’entendre tes paroles

Travesties par des gueux pour exciter des sots,

Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles

Sans mentir toi-même d’un mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,

Si tu peux rester peuple en conseillant les rois,

Et si tu peux aimer tous tes amis en frère,

Sans qu’aucun d’eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître,

Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,

Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,

Penser sans n’être qu’un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,

Si tu peux être brave et jamais imprudent,

Si tu sais être bon, si tu sais être sage,

Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite

Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,

Si tu peux conserver ton courage et ta tête

Quand tous les autres les perdront,

Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire

Seront à tous jamais tes esclaves soumis,

Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire

Tu seras un homme, mon fils.

 

Traduction plus littérale (HD)

Si tu peux garder la tête froide alors que tous

la perdent et rejettent le blâme sur toi,

Si tu peux te faire confiance quand tous doutent de toi,

En tenant compte aussi de leurs doutes ;

Si tu peux patienter sans en être fatigué,

Ou entendre calomnies, sans répondre en retour,

Ou étant haï, tu ignores la haine,

Sans avoir l’air trop bon ou parler trop sagement ;

Si tu peux rêver sans faire des rêves ton maître ;

Si tu peux penser sans faire des pensées ton but ;

Si tu peux rencontrer Triomphe ou bien Désastre

Et traiter ces deux imposteurs de la même manière ;

Si tu peux supporter entendre la vérité que tu as dites

Déformée par des gueux pour exciter des sots,

Ou regarder les choses que tu as construites, être cassées,

Rabaissées, et les rebâtir avec tes outils usés ;

Si tu peux faire un tas de tous tes gains

Et les jouer dans un lancer de « Pile ou Face »,

Perdre et repartir comme à tes débuts

Sans jamais souffler mot au sujet de ta perte ;

Si tu peux entraîner ton coeur, tes nerfs et tendons

Pour servir à leur tour après une longue inactivité,

Et endurer sans aucune autre pensée

Que ta propre Volonté qui dit : « Tenez bon ! »

Si tu peux parler aux foules et garder ta vertu,

Ou marcher avec les Rois sans perdre ta simplicité,

Si ni tes ennemis ou chers amis ne peuvent te blesser,

Si tous les hommes comptent pour toi, sans en préférer un

plus particulièrement ;

Si tu peux remplir chaque implacable minute

De 60 secondes d’actions de valeurs,

Alors ton Royaume sera la Terre et tout ce qui en dépend,

Et le plus important : Tu seras un homme, mon fils !